Découvrez le témoignage de Fabienne Ménard, CFO de Manutan
Loin de se limiter à un rôle de contrôle, les direction financières deviennet un véritable partenaire stratégique, au service de la croissance, de l’innovation et de la responsabilité des entreprises.
Dans ce contexte, Fabienne Ménard, CFO de Manutan, partage dans cette interview sa vision d’une direction financière proactive, orientée business, qui s’appuie sur la data, la transversalité et des compétences élargies pour piloter efficacement la performance, sans attendre de lourds investissements IT. De la maîtrise du cash-flow à la gestion de la donnée ESG, en passant par le pilotage fin des marges et des investissements, son témoignage illustre concrètement les leviers de transformation à la portée des ETI.
Comment Manutan met la data, l’ESG et l’efficacité opérationnelle au service de la performance durable ? Une question au cœur de sa stratégie, qui trouve des réponses très concrètes dans cette interview.
Ces enjeux, et bien d’autres, seront au cœur de Finance Forward, l’événement organisé par Micropole le 24 juin prochain à Paris, qui réunira des directions financières d’entreprises engagées dans leur transformation. L’occasion de partager retours d’expérience, bonnes pratiques et solutions concrètes pour faire évoluer la fonction Finance dans un monde en constante mutation. Réservez votre place à cet événement en cliquant ici.
« Notre objectif est de fournir des analyses et des KPI qui améliorent la rentabilité de l’entreprise et sa prise de décision, en adoptant une posture proactive plutôt que de nous limiter à la constatation des écarts budgétaires. »
Présent dans 17 pays, le groupe Manutan compte parmi les leaders européens du e-commerce BtoB.
Sa direction financière est étroitement impliquée dans la croissance de l’entreprise, qu’il s’agisse de piloter des acquisitions ou d’optimiser la performance opérationnelle. Fabienne Ménard, CFO et membre du comité de direction, nous partage ses missions et ses convictions, notamment sur l’évolution des compétences des collaborateurs pour gagner en efficacité au quotidien, sans être dépendants d’investissements IT sur les outils.
Quels sont les atouts d’une direction financière pour aider les dirigeants dans leurs décisions ?
Un dirigeant doit aujourd’hui former un vrai binôme avec son CFO. Car la force d’une direction financière c’est sa transversalité.
La direction financière joue un rôle clé dans l’aide à la décision des dirigeants grâce à deux atouts majeurs : sa transversalité et sa neutralité. C’est pourquoi le dirigeant doit former un véritable binôme avec son CFO. Ce dernier appréhende les enjeux des différentes fonctions et analyse des données financières et extra-financières afin d’anticiper les conséquences des décisions stratégiques mais aussi de les orienter.
Manutan est une ETI, donc la collaboration y est facilitée. Nous avons aussi opté pour cette approche collaborative en matière de M&A, en formant une équipe resserrée impliquant les directions générale, juridique, corporate et financière.
Par ailleurs, afin de soutenir notre développement, je m’attache à promouvoir une culture de gestion rigoureuse du cash-flow au sein de l’entreprise, notamment par le biais de l’optimisation des stocks et des processus, en optimisant les délais de recouvrement. Il est en effet impératif de maintenir un cash-flow robuste pour financer notre croissance future, que cela soit via des acquisitions, l’extension de notre réseau logistique, des investissements en marketing ou encore pour soutenir le développement de notre plateforme technologique.
Pouvez-vous nous donner des exemples de la manière dont la direction financière contribue à améliorer la performance globale de l’entreprise ?
Nous avions constaté que la manière d’appréhender la marge était incomplète et pouvait engendrer de mauvaises décisions opérationnelles. Nous avons donc collaboré avec le département de l’offre et des achats afin de leur fournir une vision plus exhaustive des marges, leur permettant ainsi d’optimiser leur stratégie de sourcing et de référencement des produits.
Concrètement, de nouveaux indicateurs de performance et une méthode de calcul simple et opérationnelle ont été mis en place. Notre objectif est de fournir des analyses et des KPI qui contribuent à prendre des décisions éclairées ainsi qu’à améliorer la rentabilité de l’entreprise, en adoptant une posture proactive plutôt que de nous limiter à la constatation des écarts budgétaires.
Au sein de Manutan, la direction financière est-elle responsable de la mise en œuvre des reporting ESG ?
Nous collaborons activement sur ces sujets avec la directrice de la RSE. Cette dernière apporte une vision sur les enjeux RSE au regard des pratiques et des objectifs de l’entreprise tandis que la direction financière veille à la fiabilité des indicateurs, en les challengeant et les sécurisant.
Nous co-pilotons par exemple le projet CSRD en définissant ensemble les recommandations et choix stratégiques. La direction financière apporte son expertise dans la compréhension des indicateurs, leur clarification, leur traçabilité, leur fiabilité et leur auditabilité. La collecte des données relèvera également en grande majorité de notre compétence.
En parallèle, l’un des défis majeurs de la CSRD réside dans la diversité des sources d’information, parfois peu structurées. Car au-delà des directions financière et RSE, elle constitue avant tout un projet transversal qui concerne tous les services. C’est pourquoi nous favorisons la collaboration entre les profils financiers et opérationnels pour mener à bien ce projet.
Enfin, nous avons également décidé de placer l’économie circulaire au cœur de notre modèle en développant une activité de reprise et réemploi de mobilier professionnel, via l’ouverture d’un Hub dédié. L’objectif est d’aider les entreprises et les collectivités à anticiper les réglementations à venir (loi AGEC, right-to-repair…) tout en contribuant à atteindre le “net zéro” en 2050. Là encore, la direction financière joue un rôle essentiel dans l’orchestration de cette réussite, notamment en priorisant les investissements.
La complexité de la CSRD réside dans la nécessité de réunir des données provenant de différents systèmes de l'entreprise, dont certaines ne sont pas nécessairement structurées.
Tirez-vous partie des contraintes réglementaires pour réorienter la manière de piloter de l’entreprise ?
Nous ne pilotons pas l’entreprise au rythme des contraintes réglementaires mais nous nous attachons à les respecter et surtout en tirer le meilleur profit.
Par exemple, nous avons choisi de viser une certification ECOVADIS pour évaluer notre démarche RSE. Dans un souci d’alignement et d’efficience, nous avons tout d’abord réalisé un mapping entre les critères Ecovadis et ceux liés à la CSRD, la RGPD et la Loi Sapin 2 afin d’établir les points d’adhérence.
Sur cette base, nous séquençons le déploiement des objectifs Ecovadis tout en respectant les contraintes réglementaires des différents domaines et nous évitons aussi de multiplier les démarches en interne. Nous utilisons également les critères de cette certification pour piloter nos indicateurs dans le cadre de la CSRD.
Notre volonté est de décloisonner notre approche, d’identifier les informations pertinentes et de définir les priorités qui serviront la stratégie RSE de manière transverse. Mon équipe travaille activement sur ces sujets depuis plus d’un an.
Justement prévoyez-vous des investissements technologiques pour faire évoluer la direction financière ?
Ma priorité dans ce domaine est le changement de notre ERP. Nous sommes confrontés à des défis d’harmonisation importants entre nos différentes filiales, réparties dans dix-sept pays : forts d’une culture entrepreneuriale et d’une croissance soutenue par des acquisitions, nous devons concilier autonomie locale et enjeux de mutualisation et d’alignement portés au niveau du Groupe. Dans cette optique, nous envisageons d’opter pour des solutions Cloud, qui faciliteront les intégrations et nous permettront de bénéficier d’innovations continues.
Je souhaite également que nous investissions dans un EPM afin de centraliser les informations et de réaliser des analyses de manière uniformisée et méthodique. Actuellement, nous utilisons Excel ou des solutions BI, mais cette approche s’avère insatisfaisante, notamment en raison d’un manque d’homogénéité qui impacte notre efficacité.
Est-il facile pour la direction financière d’obtenir des budgets pour faire évoluer ses technologies ?
Tous les métiers sont dans un contexte d’évolution rapide et l’allocation des budgets dédiés aux nouvelles technologies nécessite une priorisation rigoureuse.
La feuille de route IT est arbitrée au niveau du Comité de Direction, sur la base de critères objectifs. Il est essentiel de séquencer les projets, d’autant plus que les directions IT ne seraient pas en mesure de tirer le meilleur parti de trop de projets et de budgets sur un laps de temps trop court.
Afin de faire valoir ses besoins, la direction financière doit définir clairement ses ambitions et établir un cahier des charges précis. Un des facteurs clés complémentaire en la matière réside dans la capacité des équipes à innover de manière autonome, afin de réduire la dépendance aux investissements lourds. C’est pourquoi nos prochains recrutements ne se limiteront pas à des profils purement financiers. Nous recherchons des collaborateurs qui comprennent également les systèmes d’information et les enjeux du data management.
Ces profils seront en mesure de challenger l’IT et/ou de nous permettre d’automatiser nos processus. Les directions financières sont actuellement sous-équipées dans ce domaine et je considère qu’il s’agit d’une priorité stratégique. Le recrutement d’un profil data au sein du credit control a déjà permis de réaliser des optimisations significatives.
La transformation digitale de la finance a-t-elle rendu inutile l’offshoring ?
Manutan est une ETI, ce qui limite les effets de levier potentiels de l’offshoring. La création de centres de services partagés dans des pays à bas coûts, dans le seul but d’économiser quelques ETP ne correspond pas à notre stratégie. Nous privilégions une approche axée sur l’amélioration de la qualité des données, la mise en place d’outils d’analyse performants et l’harmonisation des processus, tout en pilotant de près les ressources allouées.
Il faut donc libérer du temps pour les collaborateurs et leur réserver des tâches à plus forte valeur ajoutée. Nous sommes convaincus que cette méthode, combinée au partage d’expertises, est plus efficace que l’externalisation à bas coûts.
L’intelligence artificielle (IA) représente également un atout précieux sur le plan opérationnel. Actuellement, nous l’utilisons pour le recouvrement de créances et pour des processus très ciblés.
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